Pourquoi ai-je tout de suite accepté le projet de Nadine Dérocles lorsqu’elle m’a proposé de faire l’école en forêt ?

Un nouvel article du Progrès, paru hier sur Etinç’ailes, explique très bien les bienfaits de cette matinée dans les bois : apprendre autrement permet un gain en confiance en soi, donne du sens aux apprentissages, fait baisser le stress, associe des apprentissages à des émotions et permet ainsi une meilleure mémorisation, etc.

Pourquoi enseigner dehors, et en l’occurrence en forêt ?

 * Cela stimule les sensations tout d ‘abord, les 5 sens sont éveillés. Il y a des milliers de textures, de matières, d’odeurs, de couleurs… Chaque saison est une nouvelle découverte  

* La forest school permet de développer leur imaginaire. Ils peuvent tout inventer, tout créer. L’enfant est à l’initiative de son apprentissage. Il a le champ de tous les possibles.

 * Leur capacité de concentration, de mémoire et d’adaptation  est augmentée, décuplée. C’est une source d’apaisement.

 * La motricité globale se développe : marcher, courir, grimper. Mais également la motricité fine par l’utilisation des scies, des sécateurs qui sont utilisés pour couper ce dont les enfants ont besoin lors des ateliers. C’est une véritable pédagogie du mouvement,  de l’éveil, de la curiosité et de l’exploration.

Se repérer dans l’espace est bien plus complexe dans la nature qu’entre 4 murs et s’il y a des chutes, elles permettent à l’enfant de mieux gérer les risques, d’essayer, de faire des erreurs, de recommencer et développer ses propres facultés critiques.

 *Des études au Texas ont montré que  la forest school permet de développer l’indépendance et la confiance en soi, et diminue le taux de trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité.

 * Le stress aussi diminue : dans un lieu moins artificiel, moins bruyant, le stress diminue considérablement pour l’enfant, comme l’enseignant. La relation enfant/adulte n’est que améliorée.

 * Les enfants développent d’autres formes d’intelligences, comme l’intelligence kinesthésique  : du corps et du mouvement, l’intelligence naturaliste : observer et comprendre les éléments naturels. L’enfant prend sa place en ayant un rapport corporel et sensoriel à la nature.

 * L’enseignement en forêt permet d’avoir conscience de son environnement, connaître le vivant, les éléments qui le composent, prendre conscience des saisons et du temps qui s’écoule. A chaque saison sa découverte : floraison, flaques, escargot, insectes, bourgeons et feuilles…

  

D’où vient cette idée ?

 Le concept de base à pris sa source dans les années 1950 avec Ella Flatau au Danemark où le concept a su s’implanter solidement sur le territoire jusqu’à devenir un référence incontournable pour les pédagogues du monde entier.

En ce qui me concerne, la nature est un besoin primordial. Ici nous avons la chance d’avoir la forêt à 5 minutes de l’école. Lorsque l’on voit l’impact que cette méthode a sur la confiance en soi, le stress, et les apprentissages. Il ne m’a pas fallu longtemps pour la proposer à la direction. J’ai suivi les modules de formations en ligne, constitué le Den Kit et voilà ! Les enfants adorent et moi si je pouvais nous irions tous les jours !

Y va-t-on quel que soit le temps ?

  Oui, en Norvège on dit qu’il n’y a pas de mauvais temps, juste de mauvais vêtements. 

Quelles règles à respecter ?

La sécurité est très importante. 

Avant la première sortie, j’ai briefé les enfants sur la façon de circuler sur le trajet. Ne jamais descendre du trottoir, et lorsque le trottoir devient étroit nous marchons en file indienne. Arrivés sur place, j’ai délimité avec les enfants le périmètre de leurs exploration. Lors des jeux libres, ils évoluent comme ils le souhaitent avec la consigne de toujours dire à l’adulte où ils vont. Il faut que nous ayons toujours les enfants dans notre vision.

Et bien sûr, ne toucher aucun végétal ou animal. Ne rien porter à sa bouche (petites baies, champignons). Nous en profitons pour étudier les « spécimens » en rentrant, j’en prends un photo.

Qu’est-ce qu’on y apprend ?

Tout ! Français, j’organise des rallyes conjugaison, nous faisons de la grammaire active, de l’orthographe, de l’expression orale, vocabulaire

Lecture en forêt

Des mathématiques, c’est la matière la plus géniale en forêt, nous avons fait du dénombrement, de la géométrie avec les arbres, des mesures.

Nous avons abordé la phyllotaxie c’est-à-dire la disposition en spirales de divers éléments naturels ce qui permet d’échanger sur Léonard de Vinci. Du land art, des sciences.

Ma méthode est la suivante, nous voyons en classe les nouvelles notions le lundi et le mardi. Le jeudi matin en forêt nous les reprenons de façon plus ludique et nous les enrichissons. Il m’arrive souvent d’aborder de nouvelles notions car les enfants sont très en demande, nous les reprenons alors le vendredi matin en classe.

Qu’est ce que ça apporte sur le plan individuel ? Le collectif ?

Sur le plan personnel, cela permet à chacun d’avoir une approche holistique du son développement  (intellectuel, émotionnel, social, physique, créatif, spirituel et potentiel)

Cela participe au  développement du  plein potentiel, de l’estime de soi,  de chacun

Le principe rédhibitoire pour l’adulte est de s’assurer d’entourer les enfants d’interactions sociales positives et constructives, d’être en forêt comme en classe, empathiques et aptes à développer leur confiance en soi et leur capacité à communiquer dans cet espace ouvert sur le monde.

Pour le collectif ? l’entraide, la coopération, le partage et la cohésion de groupe. Ils construisent d’autres liens entre eux, plus forts

Différence pédagogique entre école assis et là en mouvement ?

Les deux pédagogies peuvent être complémentaires mais ne sont pas comparables pour toutes les raisons et bienfait citées plus haut.